Le mot de Pierre Eone

CREER UN MONDE PLUS SOLIDAIRE DES DETENUS DES PRISONS

Comment créer un monde plus solidaire des souffrances des autres ? Comment faire pour intégrer dans notre quotidien la souffrance de mon frère, de mon voisin qui peine à joindre les deux bouts ?

Comment rapprocher de notre existence le vécu des détenus qui plus est, sont des mineurs dans nos prisons aujourd’hui, qui demain pourront être les nôtres ?

A bien observer les prisons africaines de près, l’expérience nous démontre que celles-ci ne sont plus uniquement le « domicile » des pauvres et autres démunis. Tous, pour une raison ou une autre pouvons-nous nous retrouver dans ces lieux qui hier encore semblaient être ceux d’une classe sociale défavorisée dite celle des pauvres.

Nous convoquons ici la solidarité agissante, indispensable à la vie communautaire qui devrait s’ouvrir sur le partage. Et pour vivre cette solidarité, il y’a des gestes parfois simples à faire aujourd’hui, pour que demain, dans la même situation, nous puissions nous aussi espérer l’attention des autres qui devrait se traduire concrètement par une visite, une poignée de main encourageante, un don, un simple regard compatissant.

Ces gestes anodins, vus de l’extérieur des milieux carcéraux, font pourtant revivre aujourd’hui ceux qui sont victimes de l’univers dramatique de nos prisons. Car il faut le dire, le séjour dans nos prisons, qu’on soit adulte ou mineur, va au-delà de la mission première de l’incarcération : la privation de la liberté d’aller et venir. Ici, il faut lutter tous les jours contre la faim, les maladies voire la mort certaine.

Depuis plus d’une quinzaine d’années, EMINED et ses amis d’ici et d’ailleurs s’efforcent d’améliorer les conditions de vie des mineurs dans les prisons de Kondengui à Yaoundé, de Mfou et de Mbalmayo. C’est une tâche très difficile, au regard de la complexité de la vie en milieu carcéral. Le détenu adulte ou mineur une fois en prison perd tous ses droits. C’est une curiosité africaine !
Nous nous employons aussi à sensibiliser les âmes de bonne volonté à s’associer à notre oeuvre de solidarité pour ces enfants, qui auraient pu être les nôtres, pourquoi pas ?

En tout état de cause, chacun de nous peut faire quelque chose… Tous ensembles, nous pouvons faire beaucoup de choses qui peuvent apporter des modifications à l’ordinaire de nos mineurs pour que la prison ne les détruise pas, et qu’ils espèrent des lendemains meilleurs dans un programme de réinsertion sociale salutaire pour tout le monde. Notre monde a besoin de cette solidarité agissante. Il est de notre devoir et de notre responsabilité d’aider notre frère ou notre enfant en difficulté. Car nous ne savons pas de quoi sera fait notre lendemain.
Il y’aura toujours des gens pour dire autour de nous que les prisonniers méritent le sort qui leur est réservé à partir des actes délictueux qu’ils posent. Mais personne n’ose se poser la question de savoir quelle est la part de sa responsabilité dans ce qui arrive à ces malchanceux. Nous qui nous estimons libres et honnêtes, souvenons-nous tout simplement que pour certains d’entre nous, la chance nous sourit pour ne pas nous retrouver au mauvais endroit et au mauvais moment.

Oui en effet, la conscience de notre culpabilité collective devrait nous rappeler que parmi les détenus jeunes ou adultes, il y’en aussi qui sont des innocents. Et même si tous étaient coupables, n’ont-ils pas droit à un élan solidarité de notre part ? Rêvons un peu d’une intégration heureuse de ces condamnés dans la société. Cela leur éviterait la récidive. Ce sera dans notre intérêt personnel et aussi et surtout dans celui de cette même société qui est la nôtre et qui aura quelque part produit ces délinquants.