LE MOT DU FONDATEUR D’EMINED

Voilà 14 ans qu’EMINED est au service des mineurs des prisons du Cameroun. C’est peut-être sur cette note que nos observateurs attentifs signeraient le livre d’or de nos réalisations depuis nos premiers pas en 2005.

Avec du recul, nous avons quand même la modeste satisfaction, que notre engagement forgé avec tant de passion, s’est fait une place de choix parmi les acteurs sociaux intervenant dans les prisons, notamment dans les quartiers des mineurs.

Cette place de choix dans la conscience aussi bien de nos protégés, que des contributeurs et autres observateurs des actions sociales, nous impose des défis. Hélas, nos moyens modestes ne nous permettent pas toujours d’aller aussi loin que nous le souhaiterions.

Un temps d’arrêt comme celui-ci nous projette nécessairement vers des souvenirs d’un parcours parfois difficile, mais passionnant pendant lequel EMINED a été éduqué pour répondre efficacement aux nombreuses attentes de nos protégés. Il s’agit de leur trouver des réponses à leurs espoirs et autres espérances.

A y regarder de plus près, EMINED a eu certes 14 ans. Mais, ce chiffre prend un volume temporel dans les  marches de la pyramide des âges à l’échelle humaine. Dans l’univers carcéral, par contre, il prend la signification d’un volume atemporel, se révélant comme un météore qui se volatilise sans traces. C’est dire que pour ces mineurs en détention, les 14 ans sont passés comme un seul jour.

Avec l’expérience acquise, 14 ans serait un âge, où les réalités variables auxquelles nous nous sommes confrontés, devraient nécessairement nous armer à affronter de nombreux défis. Et pour  nous, le défi majeur aujourd’hui est de tenir debout, en dépit de la rareté des moyens financiers, à laquelle vient se greffer malheureusement la défection, les uns après les autres, de certains de nos compagnons de route de la première heure. D’où la nécessité d’une régénération, d’une redynamisation de nos partenaires. L’idée bien réfléchie de Mme Susi Zbaeren de créer l’Association des « Amis d’EMINED » allait dans ce sens.

Heureusement, nos partenaires, qui, pour de raisons diverses ne sont plus tout à fait actifs, gardent tout de même un œil attentif sur l’œuvre d’EMINED qu’ils ne veulent pas voir mourir : c’est aussi leur « bébé »… Voilà pourquoi je rends un vibrant hommage à la famille RENAUD et adresse mes remerciements appuyés à Mme Gabrielle Keiser, qui continue de tenir le flambeau de générosité laissé par son illustre époux, Beat Keiser. Merci de ne pas laisser tomber EMINED. Chacun de nous doit donner du sien pour la survie de notre organisation.

L’entrée en scène en fin 2018 de Madame Johanna Thomann, encore une conquête de Mme Susi Zbaeren, participe également de cette diversification de partenaires dont nous avons tant besoin. Elle mettra, sans aucun doute, son expérience, acquise au sein de nombreuses associations de  renommée internationale, au service des « Amis d’EMINED ». Son engagement présumé nous permet d’espérer un nouveau souffle pour cette association. Nous lui souhaitons du reste la bienvenue dans la grande famille d’EMINED du Cameroun et de Suisse.

Merci à vous tous, les amis d’EMINED,  pour tout ce que vous faites pour nos enfants en conflit avec la loi. Nos vœux les meilleurs pour 2019.

Pierre EONE

Administrateur-Fondateur


 Cadre des activités

La population cible de notre secteur d’activité demeure les mineurs des prisons de Yaoundé, Mfou et depuis de Mbalmayo ; elle a beaucoup évolué au cours de l’année 2018, l’on a observé une augmentation du nombre de jeunes détenus : au 24 décembre 2018, ils étaient 170 mineurs pour la Prison Centrale de Yaoundé (Kondengui) et 60 pour les Prisons Principales de Mfou et de Mbalmayo. Ces chiffres élevés entrainent une grande complexité de problèmes dans le vécu quotidien de nos jeunes pensionnaires.

En effet, les prisons de Kondengui-Yaoundé, de Mfou et de Mbalmayo, comme les autres prisons du Cameroun, sont des structures vétustes et obsolètes : on retrouve l’éternel problème de la surpopulation carcérale. Qu’ils soient 170 ou un peu plus à la prison de Kondengui, ils font partie d’une population carcérale totale d’environ 4500 personnes agglutinées dans une structure qui a dépassé, depuis longtemps,  sa capacité d’accueil initiale de 800 places. Dès lors, tous les problèmes d’hygiène et de salubrité y ont élu domicile. Les autorités en charge des prisons au Cameroun donnent l’impression d’être dépassées par la situation qui prévaut. Au grave problème de la surpopulation s’ajoute le manque d’eau, de nourriture, des soins médicaux et surtout d’assistance judiciaire qui entraîne des détentions préventives sans fin.

C’est pour pallier à tous ces manquements qu’EMINED, en dépit de ses modestes moyens, s’est donné comme objectif général, d’assister les mineurs qui constituent la population carcérale la plus vulnérable. Les bénéficiaires immédiats apprécient nos interventions, l’Administration pénitentiaire aussi.

Nos visites aux mineurs demeurent régulières, deux à trois fois par semaine, parfois un peu plus en fonction de la demande des mineurs ou du personnel pénitentiaire. Les mineurs continuent à nous solliciter par tous les moyens, du fond de leur geôle, sans qu’on sache comment ils y parviennent.

Enfin, nous profitons de cette occasion pour renouveler nos remerciements à tous ceux qui contribuent à la réalisation des buts d’EMINED, permettant ainsi à l’ONG de relever les défis qui sont les siens.
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1: Ancienne cuisine de la Prison principale de Mbalmayo;  2: Cuisine offerte aux détenus de la Prison principale de Mbalmayo par les Dames de Chambrelien en Suisse: 3 et 4: Florence en compagnie du régisseur de la prison principale de Mbalmayo lors de la cérémonie d’inauguration de la cuisine.


 Dans le cadre de la réalisation de ses objectifs, EMINED a mené des activités visant à l’encadrement des mineurs en détention. Ces activités ont concerné principalement :

  • Le programme de santé ;
  • L’encadrement pédagogique ;
  • L’assistance alimentaire ;
  • L’assistance judiciaire ;
  • Le programme d’hygiène et de salubrité ;
  • La réinsertion et la lutte contre la récidive.

1. Programme de santé

Notre partenariat avec Ubipharm et la Pharmacie Sainte Elisabeth a été maintenu ; ce qui nous a permis de recevoir de ces deux organismes un don de médicaments de première nécessité et de matériel de petite chirurgie.

2. Encadrement pédagogique

Ce programme a été financé par la Fondation MTN et les fonds issus des contributions statutaires des membres d’EMINED.

  • Distribution des fournitures scolaires

Des fournitures scolaires (des cahiers,  des sacs de classe, crayons, stylos, ardoises, craies, règles, etc.) ont été distribuées à tous les mineurs de la Prison Centrale de Yaoundé.

  • Motivation des enseignants

            Ils étaient 20 et tous des détenus, chacun a perçu 20 000 FCFA, soit un total de 400 000 FCFA comme prime d’encouragement pour le compte de l’année scolaire 2016-2017.  Par ailleurs, à l’occasion de la fête des enseignants le 5 octobre, Emined leur a aussi offert de la boisson pour rehausser cette célébration.

Par ailleurs, sur les 13 candidats présentés aux examens officiels de l’année scolaire 2016-2017, les résultats suivants ont été enregistrés :

  • CEP : aucune inscription
  • BEPC : 5 inscrits, 1 admis, soit 20%
  • PROBATOIRE : 6 inscrits, 2 admis, soit 33,33% ;
  • BACCALAUREAT : 2 inscrits, 2 admis : taux de réussite 100%.

 Le Centre socio-éducatif souffre toujours du manque cruel du matériel didactique pour les élèves et les enseignants.

3. Assistance alimentaire

A l’occasion de la fête de la jeunesse le 11 février 2017 et grâce à la contribution des dames de Chambrelien, Emined a offert aux mineurs de la Prison Centrale de Yaoundé-Kondengui des aliments et de la boisson pour la célébration de ladite fête.

Grâce à la contribution de Madame Gabrielle KEISER et de  Sandrine NGUEFACK, nous avons pu offrir un repas équilibré une fois de plus le 24 décembre 2017 aux mineurs de la Prison Centrale de Yaoundé-Kondengui.

Enfin, au cours de l’année 2017, EMINED a procédé à la distribution ponctuelle du pain et des pâtes à tartiner y compris des sandwichs et des vivres frais.


4. Assistance judiciaire

Les fonds mis à la disposition d’EMINED par l’ACAT-Suisse et l’Ambassade de Suisse au Cameroun dans le domaine juridique, ont permis d’assister judiciairement cinquante-cinq (55) mineurs détenus de la prison centrale de Yaoundé. Ils ont été répartis comme suit :

  • Ouverture des dossiers ;
  • Prise en charge des honoraires de l’avocat ;
  • Paiement des amendes des mineurs condamnés.

4.1-     Ouvertures des dossiers

Depuis sa création, EMINED a pris en charge 475 dossiers grâce au financement de l’ACAT-Suisse et d’autres organisations comme les ambassades du Canada et de la Suisse. Cela nous a permis d’accélérer les procédures judiciaires afin d’aboutir rapidement au jugement, à la mise en délibéré et à la condamnation des mineurs, avec pour résultats : 393 mineurs complètement libérés.

Pour obtenir ce résultat, EMINED a mis en place une stratégie consistant à choisir un certain nombre de dossiers parmi les plus anciens et ne disposant pas de conseil, à les confier à l’avocat qui diligente et accélère les procédures judiciaires.

Cette année encore, 55 dossiers ont été ouverts : 40 par l’Acat-Suisse et 15 par l’Ambassade de Suisse au Cameroun.

4.2-     Honoraires de l’avocat

Maitre TIBIDI BESSALA, régulièrement inscrit au barreau du Cameroun demeure notre avocat conseil. Il suit toutes les procédures judiciaires concernant les mineurs pris en charge par EMINED et donne des avis juridiques pour tous les problèmes dans ce domaine qui peuvent se poser à notre organisation.

            Les dossiers retenus sont suivis jusqu’au jugement final par Me TIBIDI et le compte-rendu de leur évolution après chaque audience est communiqué au secrétariat EMINED.

4.3-     Paiement des contraintes par corps des mineurs condamnés

Il est quasi constant et nous ne cesserons jamais de le rappeler, que les condamnations des mineurs ont pour conséquence le paiement des amendes et des dommages-intérêts sans lequel les mineurs voient leur séjour se prolonger de 3 à 6 mois d’emprisonnement ferme. EMINED est alors obligé de prendre en charge ces dépenses selon ses moyens, pour éviter aux intéressés des prolongements inutiles de peine. Pour l’année 2017, 17 mineurs ont été libérés après paiement des amendes.

En conclusion, pour l’année 2017, sur les 55 dossiers ouverts, 27 mineurs ont été définitivement jugés, condamnés et libérés, dont 17 après paiement des amendes, 10 purgent encore leur peine et 18 restent en cours de jugement.

Enfin, parmi les 07 dossiers restant en cours de jugement en 2016, 04 ont été jugés et libérés, 03 ont été condamnés et purgent encore leur peine.


5. Programme d’hygiène et de salubrité

Nous n’avons jamais cessé de le dire, nos prisons sont et restent de véritables repères d’insalubrité. La surpopulation et le manque d’entretien en sont les véritables causes. Grâce au financement des membres d’EMINED, nous avons fourni aux jeunes détenus des produits et du matériel d’hygiène (savon de toilette, savon de ménage, eau de javel, balais, brosses, insecticides, etc.).


La réinsertion et la lutte contre la récidive

6.1-     Préparation à la réinsertion

Ce programme concerne les mineurs encore en détention. Il vise non seulement à lutter contre l’oisiveté et le désœuvrement, mais aussi à préparer les mineurs à l’exercice des petits métiers pendant la durée de leur détention : tissage, couture, informatique, cordonnerie et peinture.

Grâce au financement de l’Ambassade de suisse au Cameroun, EMINED a pu réaliser son projet de formation en couture et en informatique des jeunes et femmes détenus des prisons de Yaoundé-Kondengui, Mfou et Mbalmayo.

  • Informatique

Le projet concernait 50 détenus mineurs et femmes confondus des prisons de Yaoundé, Mfou et Mbalmayo. La formation a été faite pendant  trois mois dans chaque prison.

Nous avons débuté la formation par la prison centrale de Yaoundé. Le matériel de formation (deux ordinateurs, une imprimante et des consommables) a été acheté et mis à la disposition du centre socio-éducatif de cette prison. Deux formateurs ont été recrutés pour leur dispenser les cours. La formation proprement dite a commencé au mois d’avril et s’est achevée au mois de juin 2018. Au total dans cette prison, 35 détenus (25 jeunes et 10 femmes) ont été formés et ont reçu leur parchemin de fin de formation. 

A la prison principale de Mfou, 20 détenus ont été formés (12 jeunes et 8 femmes) ; le matériel de formation (trois ordinateurs, une imprimante et des consommables) a été mis à leur disposition et deux formateurs ont été recrutés. La formation a commencé au mois de juillet et elle s’est terminée au mois de septembre 2018.

Enfin, nous avons clôturé la formation par la prison principale de Mbalmayo, d’octobre à décembre 2018. Dans cette prison, nous avons formé 13 détenus, soit 9 jeunes et 4 femmes. Le matériel de formation (deux ordinateurs, une imprimante et des consommables informatiques) a été mis à leur disposition ainsi que deux formateurs.

En conclusion, au lieu de 50 détenus prévus au départ pour être formés en informatique, nous en avons finalement formé 68, soit 22 femmes et 46 jeunes garçons. Leurs réalisations sont encourageantes. 

  • Couture

Dans ce domaine, l’objectif était de former 100 détenus, jeunes garçons et femmes confondus, dans les prisons citées plus haut. Chaque prison devait bénéficier de 3 mois de formation.

A la prison centrale de Yaoundé, nous avons formé 40 détenus, soit 30 jeunes garçons et 10 femmes au cours des mois d’avril, mai et juin. Le matériel de formation (trois machines à coudre, un fer à repasser et le matériel de base en couture) a été mis à la disposition du centre socio-éducatif de ladite prison. Deux formateurs ont été également recrutés pour la circonstance. A la fin de cette formation, les parchemins ont été remis aux apprenants.

Courant les mois de juillet, août et septembre 2018, la formation s’est déroulée dans la prison principale de Mfou ; 32 détenus (20 jeunes et 12 femmes) ont été formés. Le matériel de formation (trois machines à coudre, un fer à repasser et le matériel de base) a été mis à leur disposition, ainsi que deux formateurs recrutés.

Nous avons achevé ce programme par la prison principale de Mbalmayo. Dans celle-ci, 18 détenus ont été formés, soit 10 jeunes et 08 femmes. Nous avons mis à leur disposition non seulement du matériel de formation (deux machines à coudre, un fer à repasser et le matériel de base), mais aussi deux formateurs. La formation a commencé au mois d’octobre et s’est terminée au mois de décembre 2018.

En définitive, à travers ce programme, il était prévu de former 100 détenus jeunes et femmes ; nous en avons formé finalement 90. Ceux qui n’ont pas reçu la formation ayant quitté entre temps le milieu carcéral.

  •      La réinsertion sociale

Il s’agit là d’un programme destiné aux mineurs sortis de prison. Ces jeunes n’ont plus de repères sociaux, ni d’appuis et sont par conséquent exposés à la récidive.

En partenariat avec les établissements de la place (Menuiserie du Progrès,  Garage Georges), EMINED a encore engagé en 2018 un programme de formation professionnelle de 2 ans pour 4  jeunes dans les disciplines suivantes :

  • 2 en menuiserie ;
  • 2 en mécanique automobile ;

Par ailleurs, les 7 anciens jeunes détenus mis en formation en 2017 continuent normalement leur apprentissage. Alors que ceux de 2016, soit 6 jeunes, ont achevé leur formation : 4 ont été recrutés par leurs formateurs et 2 sont encore à la recherche d’un emploi.


EVENEMENTS SPECIAUX

Les Dames de Chambrelien, dans le Canton de Neuchâtel, demeurent toujours nos partenaires dans la réalisation de nos objectifs, même si certaines de leurs actions sont en dehors des véritables buts d’EMINED notamment lorsqu’elles apportent un soutien aux dames de la prison de Mfou et de celle de Mbalmayo. Grâce au financement de ces dames:

  • Courant le mois d’avril, une cuisine digne de ce nom a été construite et offerte aux détenus de la prison Principale de Mbalmayo ;
  • Le 29 mai 2018, à la faveur de la fête des Mères et sur la demande des bénéficiaires, EMINED a offert aux femmes détenues de la Prison Principale de Mfou des produits d’hygiène et de salubrité : eau de javel, serpillières, balais, brosses et savons de ménage, récipients etc. 
  • Le 22 décembre 2018, toujours grâce au financement des Dames de Chambrelien, nous avons offert encore aux dames de la prison de Mfou, toujours sur leur demande, des produits alimentaires et les ustensiles de cuisine : casseroles, assiettes, louches, cuillères, ainsi que des produits de première nécessité : poisson frais, sacs de riz, tomates, huile de cuisine et autres ingrédients nécessaires à la cuisine.